1 mars 2020

KYLIAN MBAPPÉ- Lettre aux jeunes



Aux enfants de Bondy,

Aux enfants d’Île-de-France,

Aux enfants des banlieues,

Je veux vous raconter une histoire.


Il s’agit de football, ce qui ne vous surprendra pas. Avec moi, tout est toujours à propos de football. Vous pouvez demander à mon père. Quand j’avais trois ans, il m’a offert pour mon anniversaire un petit 4×4. Vous savez ceux avec un petit moteur électrique. Vous pouvez vous asseoir à l’intérieur et les conduire. Il y avait des pédales et tout ça. Mes parents me laissaient le conduire depuis notre maison jusqu’au terrain de foot de l’autre côté de la rue, comme si j’étais un vrai footballeur qui conduisait pour aller à l’entraînement. Je prenais ma routine très au sérieux. Tout ce qu’il me manquait, c’était ma trousse de toilette.

Mais à peine arrivé en bas de chez nous, je laissais la voiture dans un coin pour aller jouer au ballon. Jouer au foot était bien plus important que trainer dans cette voiture qui faisait pourtant rêver mes copains.

Pour moi, le ballon c’était tout.

Donc oui, cette histoire parle de football. Mais en fait, vous n’avez pas besoin d’aimer le football pour écouter cette histoire. Parce que cette histoire n’est vraiment qu’à propos de rêves. À Bondy, dans le 93, dans les banlieues, il n’y a peut-être pas beaucoup d’argent, c’est vrai. Mais nous sommes des rêveurs. Nous sommes nés comme ça, je pense. Peut-être parce que rêver ne coûte pas grand chose. En fait, c’est gratuit.

Nous vivons là-bas dans un incroyable mélange de différentes cultures – française, africaine, asiatique, arabe, tous les coins du monde. Les gens en dehors de France parlent toujours des banlieues de façon négative mais quand vous n’êtes pas de là-bas, vous ne pouvez pas comprendre ce que c’est. Les gens parlent de délinquants comme s’ils avaient été inventés là-bas. Mais il y a des délinquants partout dans le monde. Il y a des gens qui galèrent partout dans le monde. La réalité est que quand j’étais petit, j’avais l’habitude de voir certains des gars les plus durs de mon quartier porter les courses de ma grand-mère. Vous ne voyez jamais ce côté-là de notre culture aux infos. Vous entendez toujours parler du mauvais, jamais du bon.
Il y a d’ailleurs une règle à Bondy que tout le monde connaît. Tu l’apprends quand tu es jeune. Si tu marches dans la rue et que tu croises un groupe de 15 personnes et tu ne connais qu’une seule de ces personnes, tu as deux options: soit tu les salues d’un signe de la main et tu continues ton chemin, soit tu vas les voir et tu serres la main des 15 personnes.

Si tu vas les voir et que tu ne serres la main que d’une personne, les autres 14 personnes ne t’oublieront jamais. Ils sauront quel genre de personne tu es.

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